À Rimbaud, Réponses choisies (Recueil collectif de poèmes sur Arthur Rimbaud)
À Rimbaud, Réponses choisies
1ere Prix du concours académique
« Sur les Traces de Rimbaud » 2004
Professeure : Annie Massy
En 2004, un concours académique invitait les professeurs de Lettres à faire écrire des poèmes sur Arthur Rimbaud, pour célébrer le centenaire de sa naissance à côté de Charleville. Annie Massy a relevé le défi avec sa classe de seconde Professionnelle (BEP). Les élèves avaient à lire un recueil de poèmes d’Arthur Rimbaud et chacun, librement, choisissait celui qu’il préférait. Comme les jeunes avaient à peu près l’âge du poète quand il les a écrits, ils devaient lui répondre en vers, comme s’ils s’adressaient à un camarade.
Ils ont obtenu le premier prix dans la catégorie « Recueil classe ».
À noter : comme il s’agissait d’un concours, les élèves n’ont pas signé leurs poèmes originaux. Certains sont l’œuvre de plusieurs, voire de la classe entière : ils sont signalés par « œuvre collective ».
Photo ci-dessous : la classe de BEP et leur professeure, Annie Massy
Premières Rencontres : Hai Hai Haïku (œuvre collective)
La beauté, Arthur Elle fait partie de la vie Toi, qu’en penses-tu ? |
C’est beau la nature Et la poésie, Arthur ? C’est franchement dur ! |
D’où vient la passion ? Cette aventure d’écrire ? Et l’inspiration ? |
Si belle fut ta vie Bien trop vite elle s’est finie Avec poésie
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Tu es poète Moi je n’aime pas écrire On est différent |
T’es-tu réfugié Dans l’art de la poésie Pour fuir tes problèmes ? |
À quel âge as-tu Commencé la poésie ? Qui t’a inspiré ? |
Ophélie est-elle Quelqu’un que tu as aimé Et qui est parti ?
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Qu’a-t-elle de cruelle ? Pourquoi quitter Charleville Et vivre en rebelle ? |
N’était-elle pas belle Ta vie dans les Ardennes ? Trop habituelle ?
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Écrire des poèmes Sur cette planète amère Et vivre en bohème |
Combien de misère Pour trouver l’inspiration Fuir et changer d’air |
Poème collectif inspiré par : Voyelles d’Arthur Rimbaud
« A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles
Golfes d’ombre » (Œuvre collective)
A noir, qui s’engouffre comme le désespoir
Avec un son aléatoire dans nos mémoires
A gris comme la pluie sur les visages
Des gens peu sages, des gens sans âges
Qui coulent la tristesse d’une trop longue vie
Qu’ils n’ont Pas réussie
A rouge sang des corps languissants, des cris incessants
Et des gens qui se pendent en attendant
Le résultats des crimes omniprésents
Mais aussi rouge sang des armées désarmées
Par la vie et la poésie
Rouge couleur de l’amour, arme de la vie
A marron de la terre que foulent nos premiers pas
A blanc ; qui veut la naissance dit : Alpha
Qui veut le mariage
Veut le concubinage
Qui veut la mort dit : Oméga
A argent, bonheur des banques, autrefois la puissance
Richesse surannée, dépassée, sans importance
Aujourd’hui est ici
À partir de Voyelles, d’Arthur Rimbaud (autres inspirations)
A acajou des cheveux, cheveux dorés comme la brioche
Brioche brûlée par le soleil, soleil de la mer, mer de sable,
Sable et vent, vent dans les branches, branches des arbres,
Arbres de bois, bois d’acajou
A rose, reflet doux et romantique, amour qui fleurit
Rose des cœurs qui adoucit
Les mœurs, rosée du matin, fraîche et étincelante
Qui attire la chaleur innocente
A turquoise, océans où vivent les mammifères
Animaux sensibles qui se confondent
Dans la couleur de leur monde
Ce monde qui pour les hommes est un mystère
Que l’on ne peut exploiter, nous les hommes
A vert de la nature, tant aimée par Arthur
Couleur des feuilles d’arbres et parfum des forêts
Alliance des animaux et des bosquets secrets
A vert de l’eau, source de la verte nature
Naissance de la vie, pluie de la nuit
Fraîcheur de l’air le matin fleuri
L’eau et la nature sont essentielles
Comme le A dans les vers des ritournelles
(Œuvre collective)
« O pale Ophélia ! Belle comme la neige !
Oui tu mourus, enfant, par le flot emporté !
Rimbaud, Ophélie
Comme un arc-en-ciel aux multiples couleurs
Je regarde les fleurs, aux différents parfums
Je sens la liberté, dans l’air pur du matin
Impression de renaître, sensation de bonheur
Même la mort te rend heureuse douce Ophélie
Unie à la nature, ton âme se repose
Dans ce linceul, la liberté, enfin s’impose
C’était ton choix, finies l’angoisse et la folie
Moi aussi le dimanche, je vis la liberté
Penser, aimer, rêver, voler, pêcher, prier
Dans la forêt, près de chez moi, je caracole
Sous les yeux protecteurs de ma grand-mère aimée
J’oublie les profs et le travail trop acharné
La vraie liberté, enfin, hors de l’école !
Ophélie, d’Arthur Rimbaud (autre inspiration)
Belle Ophélie à tout jamais endormie
Pour ton amour aveuglé, tu t’es sacrifiée.
Personne ne viendra te déranger la nuit,
Seule, les rêves évanouis, le cœur brisé.
O Ophélie emportée par la tristesse
La lune éclairant tes larmes apaisées
Les eaux gardent pour l’éternité ta jeunesse ;
Et, bercée par les flots, ta vie s’est envolée.
Ta longue chevelure flottant sous le vent
O ciel ! Éclairant la belle endormie,
Amoureuse perdue par ses beaux sentiments
Les chants de la nuit portent ta folie.
Ophélie (autre inspiration)
Ophélie,
C’est si joli
Pourquoi aimer
Un être inventé ?
Peut-être un jour va-t-elle revenir
Au plus profond de tes souvenirs ?
Tu parles d’un fantôme blanc
C’est émouvant
Tu étais amoureux
C’est fabuleux
Tu parles d’un fleuve noir
As-tu peur de tomber dans le désespoir ?
Tu parles de folie
Mais c’est elle qui fait le beau de la vie :
Elle passe et repasse
Dans les moindres recoins qui ont gardé ta trace.
Inspiré par : « Par les soirs bleus d’été, j’irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue… » Sensation, d’Arthur Rimbaud
Lorsque la Lune bientôt sera au zéphyr,
Ses rayons pâles ranimeront mon seul cœur
Et la campagne remplie d’une fraîche odeur
Reviendra comme un compagnon pour me chérir.
O que j’aime ces moments de pure harmonie
Tendres, mélodieux, enchevêtrés de rêves
Et au crépuscule qui devant moi s’achève
Je suis à nouveau réveillée et attendrie.
J’attends que la nature vienne à ma rencontre
Au détour d’un chemin sale et 1e jeu des ombres
Le cachera. Tapie au creux de la pénombre
J’attends que les champs, à nouveau fleuris, me montrent
Celui qui sera la merveille de mon cœur ;
Et un jour, peut-être, il fera mon bonheur.
Inspiré par « O mes petites amoureuses,
Que je vous hais ! » Arthur Rimbaud, Mes Petites Amoureuses
Arthur Rimbaud, vous aimez la nature !
Mais je vous trouve peu mature
Comment pouvez-vous versifier ainsi
Et dire, ailleurs, que l’amour est infini ?
Certes, une femme vous rendrait heureux,
Mais cette histoire ne durera pas toujours
Vos poèmes la feront fuir au bout d’un jour
Je vous assure que l’amour n’est pas un jeu.
Juste une dernière chose :
Prenez le temps d’une pause
Et remettez en question
Vos envies et vos passions !
Et encore une inspiration d’Ophélie, d’Arthur Rimbaud
Je pense qu’elle s’est noyée, asphyxiée.
Mais cela n’a pas empêché que tu l’aies tuée.
Je veux briser le sort que tu as créé.
Je ne te laisserai pas l’enterrer !
Je ne te laisserai pas l’étouffer !
Je ne te laisserai pas l’assassiner !
Le temps s’écoule…Tu ne peux pas la passer
Sous terre ! Tu ne peux pas l’empêcher de hurler !
Elle a voulu la liberté :
Pliée et contrainte, elle a essayé, éro,
De se passer de toi, mais elle était accroc
Maintenant tu sais qu’elle est prise à jamais
Elle ne songera plus à briser cette idée
Fixe. Tu l’as forcée, tu 1’as serrée
Tu as extrait sa vie d’efforts las
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Inspiré de Le Mal, d’Arthur Rimbaud
Puisqu’elle s’est mise au travers de ma route,
Monte ma haine et hurle très fort !
Elle criera pour que tu doutes.
Je ne te retiens pas. Dehors !
Monte ma colère et disperse cette haine !
Elle volera, tu tomberas, tu brûleras.
Personne ne te soutiendra !
Que l’espoir sorte de tes veines !
Que la peur sorte de tes yeux !
Elle te trahira et me vengera.
Résultat : mal et souffrance pour nous deux.
Inspiré par « Oisive jeunesse
À tout asservie…. » Chanson de la plus haute Tour, d’Arthur Rimbaud
L’Amour est une guerre
Mais la guerre d’Amour
Tue de plus en plus chaque jour
Alors prends garde à toi
Si tu t’énamoures
Car ton seul toit
Sera le velours
Enivrant de l’amour
Qui se transformera un jour
En enfer
De la guerre
Mais la guerre de l’Amour.
Qu’est-ce que la vie sans Amour ?
Rien !
À quoi sert la vie s’il y a la mort ?
À te donner une raison de vivre comme tu veux
Ton Amour à deux !
Car Ia vie ne vaut d’être vécue sans Amour.
Mais une fois que tu l’auras connu, alors tu peux mourir
Tranquille car tu auras vraiment vécu !
Inspirés par Ma Bohême d’Arthur Rimbaud
Au lever du jour, toute la nature s’éveille
Et le monde reprend ses éternelles habitudes.
Certains vont à l’école, d’autres vont au travail
Et recommence une journée de lassitudes.
À quand toutes les joies de vivre dans l’imprévu ?
Voyager, vivre au jour le jour, sans aucun but ?
Une drôle de vie, mais rien n’est plus beau.
N’es-tu pas d’accord avec ce poème, Rimbaud ?
Autre inspiration
Tu cherches à résoudre
Résoudre tous tes problèmes de pauvre hère
Mais tu préfères coudre
Coudre la misère
Misère de l’araignée noire
Noire du désespoir
Tu aurais préféré avoir une vie meilleure
Toute pleine de bonheurs
Mais après tout tu as choisi ta vie
Tu as choisi ton avenir
Tu as choisi d’écrire
Pour exprimer tes cris.
Parfois la colère t’envahit
Elle envahit ton corps entier
Alors tu préfères fuir cette terre
Qui ne t’apporte que la misère.
Inspiré par : Rêvé pour l’Hiver, d’Arthur Rimbaud
Le printemps est arrivé ce matin, ici.
Tout le monde l’attendait, ça y est, il est là !
Les oiseaux sont revenus, les fleurs les voilà
Le printemps est une belle saison qui nous ravit.
Les rivières serpentées coulent joyeusement
Les poissons frétillent et narguent les pêcheurs
Ces derniers attendent de longues heures
Au bord de la rivière, seuls, en s’impatientant.
Les oisillons prennent leurs premiers envols.
Les parents encouragent avec des ailes qui dansent.
Leurs premières peurs passées, les petits s’élancent.
Après plusieurs essais, ils sont prêts pour le grand vol.
Inspiré par Larme, d’Arthur Rimbaud
Magnifique spectacle nous offre la nature !
Mais elle déverse, parfois, ses quelques larmes.
L’Homme comprendra-t-il qu’elle perdra ses charmes
Si elle souffre trop à devenir impure ?
Le vent hurle aussi pour répéter des cris
Des cris lancés à l’unisson, la terre entière,
Mais voilà, l’Homme est bien mauvais avec sa mère
Qui pourtant l’a laissé y construire ses abris.
Quand bien même notre soleil luira toujours
Même si la planète tournera chaque jour,
I1 manquera a\monde une chose : l’Amour !
Les âmes sont taries et le sol altéré
Et le peuple griffé par la guerre acérée
Et je rêve, rêve, d’un pays de velours !
Inspiré par Première Soirée d’Arthur Rimbaud
Allons… c’est sûr, tu as rêvé !
D’accord ; elle était dénudée…
Mais ne te fais pas d’illusions
Et ne te pose pas de questions
Arrête de causer des ennuis :
Ou tu y vas, ou tu l’oublies !
Inspiré par Le Dormeur du Val, d’Arthur Rimbaud
À côté de lui, une étendue d’herbe immaculée de rouge soufflait à la bise du vent
Ce rouge ruisselait à côté de belles fleurs violettes
Un autre homme, jeune, innocent, était aussi étendu à côté du premier
C’étaient des amis, des amis pour toujours
Ils s’étaient promis de rester ensemble
Seule la mort aurait pu les séparer
Mais au contraire, la mort les a réunis.
Inspiré par Départ, d’Arthur Rimbaud
Tu pars et sans égards, loin de notre village
Pour découvrir la mer et marcher sur le sable
Loin des rumeurs, loin des coups bas, loin des regards,
Pour te mettre à l’écart de ces gens avares
Tu es part sans un mot, sans un aurevoir
As-tu pensé à moi sans oser me le dire ?
N’écoute pas ce que les gens murmurent le soir
C’est ton cœur qui est le seul à pouvoir choisir
Tu as choisi de t’évader vers f inconnu
Ton départ a laissé dans ton jardin des fleurs
Myosotis et pensées contre ma douleur
Mais pourquoi, pour moi, n’es-tu jamais revenu ?
Mais qui êtes-vous, monsieur Rimbaud (acrostiche, œuvre collective)
Ardennais fugueur à la poursuite du vent
Rebelle à la mèche comme lui indomptée
Ténébreux au regard profond et captivant
Horreur des bons bourgeois de sa triste cité
Utopique marcheur aux semelles agitées
Rêveur et voyageur, toujours provocateur
Romantique attendri et poète maudit
Intriguant, trafiquant vers l’Abyssinie
Mort à Marseille avec encore l’envie d’ailleurs
Bel adolescent rimant son éternité
Arrogant refusant de rester enchaîné
Unique précurseur de poésie nouvelle
Dresseur jongleur des mots qui font pousser des ailes
Photos de la remise du prix à Reims par le Recteur des Universités : une délégation d’élèves de la classe très sérieuses… mais qui savent aussi s’amuser.