Yvon Lallemand (décédé en 2011)

 

Président de l’AEHM et Président d’Honneur de l’AHME

Sommaire :                           

                                                              I – Résumé biographique

                                                             II – Hommage de Gil Mélison-Lepage 

                                                            III – Discours funèbre d’Annie Massy

                                                            IV – Œuvres

Résumé biographique

       Lorrain d’origine et arrivé en Haute-Marne en 1973, Yvon Lallemand passe quelques années en Algérie et au Sahara. Professeur de Lettres à Saint-Dizier, il se passionne pour le terroir il recueille (et raconte dans son style) les légendes de Haute-Marne. Il est également poète et peintre reconnu de la nuit baroque et du rap’Art. Il ne vit « qu’avec le soleil et la lumière » mais ses sources d’inspiration principale, littéraire et picturale, restent sans aucun doute les femmes.
    Il fut l’un des trois écrivains fondateurs de l’Association des Ecrivains de Haute-Marne dont il fut Président pendant vingt-quatre ans. Il en a été jusqu’à son décès, Président d’Honneur.
     Yvon Lallemand est décédé le 2 février 2011 et repose au cimetière de la Noue (Saint Dizier)

Photo : en 2005, il pose à l’assemblée générale de l’Association des écrivains de Haute-Marne, avec les écrivains présents. Il est facilement reconnaissable avec son chapeau, le premier en partant de la gauche.

Hommage par Gil Mélison-Lepage, Présidente de l’AEHM (future : AHME)

        Comment Yvon est entré dans ma vie :

        J’ai vécu plus de quarante-cinq ans à écrire en catimini. En cachette, comme si écrire était une tare, un défaut à mettre en parenthèse. Puis un jour, Yvon, qui connaissait ce vice caché, m’a invitée à rejoindre l’association des écrivains de Haute-Marne (qui deviendra en 2008, Association haut-marnaise d’écrivains) qu’il présidait. Mais comment Yvon avait-il eu vent de cette tare bien dissimulée ? Simplement parce que j’étais amie avec la famille Duroux, donc avec Catherine, la femme d’Yvon (tiens, on dirait les paroles d’une chanson de Brassens)
       C’est elle qui lui a glissé au creux de l’oreille « Gil Melison écrit des poèmes » et comme Yvon aimait rassembler les créateurs de la région, il m’a ramassée au bord de la route littéraire, il m’a donné un peu plus d’assurance en la matière. On ne résistait pas aux yeux bleus d’Yvon, à son charme bourru, à sa façon de nous faire croire que nous étions essentiels à la bonne marche d’un groupe. Aussi, me suis-je laissée séduire.        

       Et c’est comme ça qu’un matin brumeux, je me suis retrouvée attablée dans un petit restaurant haut-marnais, assistant à l’assemblée générale d’automne de l’AEHM. Une bande de joyeux drilles y entourait un président farceur. Car Yvon n’était pas un président très académique et les réunions se tenaient sans véritable ordre du jour. Chacun y prenait la parole, faisait part de ses dernières productions. On lisait, on chantait, on trinquait et on riait beaucoup. Parfois même, on y jouait de l’accordéon. Yvon jubilait.
      Comme il se réjouissait aussi lors des rencontres artistiques du département auxquelles assistait un noyau de fidèles, pour lesquels la mise en valeur de leurs œuvres n’était que le prétexte à des retrouvailles entre compères.

         Quand les chiffres rencontrent les lettres :
   Car je suis, avant d’être une littéraire, comptable/juriste de par ma formation. Ce qui fait que dès mon arrivée à l’AEHM, on m’a demandé d’assurer l’intérim du poste de secrétaire-trésorière, le temps pour Yvon Régin, titulaire de la charge, de retrouver la santé. Je l’ai dit plus haut, on ne résistait pas aux demandes d’Yvon. Aussi ai-je accepté avec enthousiasme cette mission. Mission qui a duré huit ans : Yvon Régin, hélas, n’ayant jamais retrouvé sa pleine santé.
      À partir de cette époque des dossiers de subventions ont été déposés afin d’envisager les animations de l’association en plus grand format. Afin également de gagner une certaine crédibilité dans le département. J’ai rencontré les institutionnels. J’ai plaidé nos projets et, souvent, j’ai obtenu gain de cause. Yvon, qui n’était pas un homme d’argent, s’épatait de cette manne providentielle. Notre couple fonctionnait à merveille, le Président artiste, un peu iconoclaste, toujours provocateur, donnait son charisme, sa gouaille ; la secrétaire trésorière apportait sa rigueur, son organisation. Et comme Yvon habitait à deux pas du bureau où je travaillais, nous nous voyions souvent. Je passais à l’improviste, le soir, entre midi et deux. Nous discutions. Nous convenions de la marche à suivre. Il m’a toujours fait confiance, me laissant toute liberté pour la présentation des choses.

Photo : Yvon Lallemand au centre, entouré de Thierry Beinstingel (à gauche) et Jérôme Prévost, à droite, lors des « samedis aux Silos » de Chaumont. Devant, un portrait d’Arthur Rimbaud fait par Yvon.

            Le jardin du peintre :
      Que de plaisirs, que de bonheur vécus chez Catherine et Yvon. Car tout au fond de l’impasse, dès la grille poussée, perdu dans la verdure se tenait le « jardin du peintre » qui, à l’instar de celui de Monet, offrait aux visiteurs le calme et la sérénité. Yvon adorait cette maison hors le temps, véritable havre de paix. L’ancienne maison du jardinier de l’usine attenante, comme il aimait à le rappeler, était devenue le rêve bleu du peintre, la toile de fond inspiratrice de l’écrivain, un jardin en fleurs, des fenêtres en charmilles, des allées en tableaux, des fauteuils en bras ouverts. Un jardin habité par une colonie de chattes noires aux yeux turquoise.
       Comme il faisait bon s’y retrouver autour d’une table toujours dressée pour les copains. Car Yvon excellait en cuisine, et affectionnait les tablées d’amis. Combien de fois, m’y suis-je retrouvée, en compagnie de Jérôme Prévost, un élève d’Yvon qui avait obtenu à 18 ans, le Prix Arthur-Rimbaud, récompense nationale et convoitée, remise à Paris en grandes pompes au Ministère de la Jeunesse et des Sports. Reconnaissance pour un premier recueil de poésies que son mentor-professeur l’avait poussé à présenter. Car Yvon, découvreur de talent, recrutait de nombreux membres pour l’AEHM parmi les lycéens auxquels il enseignait la littérature à l’ESTIC. Jérôme assurera l’intérim du secrétariat-trésorerie durant mon « ministère » d’adjoint à la culture de la ville.
      Que de fou-rires nous y avons piqués. Comme lors de la tempête de 1999 après laquelle Yvon, ayant ramassé sur la place de la mairie de Saint-Dizier le bras disloqué de la statue qui orne cette place, l’avait ramené chez lui et l’exhibait comme un trophée volé aux éléments déchaînés (rassurez-vous, il l’a rendu). Que de moments délicieux nous y avons vécus à échafauder des projets littéraires, ou à imaginer des idées loufoques ; à préparer les salons du livre de Saint-Dizier dans une effervescence constructive ou bien à faire assaut de contrepèteries, genre qu’Yvon maniait avec talent. Je le vois encore, souriant dans sa barbe, l’œil pétillant et les épaules agitées d’un fou-rire. Ces souvenirs sont inaltérables.

      Les tempêtes
      Puis hélas, dans ma vie, comme dans celle d’Yvon, les nuages se sont accumulés. Des tempêtes ont obscurci notre existence. Sous son air joyeux, sous ses boutades, derrière ses fanfaronnades, Yvon cachait une mélancolie chronique. Cette reconnaissance qu’il estimait insuffisante, cette obligation d’être enseignant alors qu’il rêvait d’être uniquement un artiste, ce mal de vivre qui l’habitait, le poussaient aux extrêmes. Combien de fois a-t-il pleuré sur mon épaule ? Il était si difficile de le consoler d’un chagrin incommensurable, d’une peine si profonde (tiens, on dirait les paroles d’une chanson de Brel)
     Pris chacun dans nos tourments, affectés par nos soucis, nos chemins se sont séparés. Nous avons emprunté des routes différentes. Yvon a dû vendre la maison bleue. Déménager. Ce fut un déchirement pour lui. Mais nous avons conservé une amitié indestructible qui nous poussait dans les bras l’un de l’autre à chaque rencontre au hasard des rues de Bragardie. Et aujourd’hui, je suis bien triste de son départ précipité. Lui qui rêvait de « mourir vieux et en bonne santé » …..
    Mais les artistes meurent-ils vraiment ? Ou bien s’installent-ils pour l’éternité entre copains au Panthéon de l’imaginaire ? J’aime à le croire.

départ précipité. Lui qui rêvait de « mourir vieux et en bonne santé » …..
Mais les artistes meurent-ils vraiment ? Ou bien s’installent-ils pour l’éternité entre copains au Panthéon de l’imaginaire ? J’aime à le croire.

Gil MELISON-LEPAGE
Présidente de l’AEHM de 1991-2005
Présidente d’Honneur de l’AHME

Discours d’Annie Massy à son enterrement

Photo de 2007, salon du livre organisé par Annie Massy, pendant le Grand Pardon de Chaumont. Yvon Lallemand est à droite, Jean§Claude Daniel, Maire de Chaumont, au centre et Annie Massy à gauche.

       Je ne vais pas ajouter à l’émotion pourtant bien réelle : Yvon tu n’as jamais aimé voir tes amis pleurer. L’association des écrivains de Haute-Marne devenue depuis Association haut-marnaise des écrivains, que tu as contribué à créer, veut garder de toi le meilleur.

– Nous gardons de toi tes plaisanteries, ta bonne humeur, tous ces rencontres amicales qui font aimer la société des humains autant que celle des artistes.

– Nous gardons de toi : ta passion d’innover, d’inviter à se lancer, donc à nous lancer aussi dans des projets fous qui nous donnaient envie d’écrire, de partager nos œuvres, de les faire connaître au public. Yvon, tu nous donnais le courage d’aller au bout de nos envies et cela, c’est géant.

     Tu nous quittes un jour d’hiver avec l’angoisse d’être oublié. Ne te fais pas de souci, le printemps des artistes est toujours programmé pour arriver à son heure. Tu peux rejoindre tes bons copains, Yves-Marie Debande, Jean Robinet et bien d’autres et refaire avec eux une association qui ne risque pas d’être ennuyeuse. Quelque chose me dit que ton arrivée sous les « ombres myrteux » (selon l’expression de Ronsard) n’est pas triste.

     Pour le souvenir, ici, ne t’en fais pas, on y veille, on n’est plus au temps où l’on enterrait les artistes la nuit dans la fosse commune. Tiens, d’ailleurs, tu vas être content de notre blague du jour : on a déjà réussi à prendre une demi-heure au fossoyeur sur le temps prévu, pour les discours en ton hommage ! On va continuer cette chaîne de création et de transmission que tu as ancrée en Haute-Marne et qui en dépasse les limites… et je commence tout de suite en m’adressant à ceux qui sont autour de ton cercueil par une phrase officielle :
Après Arthur Rimbaud et Bernard Dimey, nous enterrons aujourd’hui notre dernier artiste maudit et le millénaire qui va avec. Mais les artistes ne meurent pas, ils tournent la page et, aujourd’hui nous ouvrons une légende.
       (Discours lors de l’enterrement d’Yvon Lallemand, fait part Annie Massy, Présidente de l’AHME, 12 février 2011 au cimetière de la Noue, Saint Dizier)

Son œuvre

 Terre d’Ombre Brûlée (roman poétique, prix du Conseil Général de Haute-Marne, 1978)

Pour ce texte en prose poétique, Yvon Lallemand s’est inspiré des trois années qu’il a passées en Algérie et des femmes qu’il a aimées sans réussir à les retenir.
Que lui reste-t-il des étendues désertiques et du bord de mer dans les années 1970 ? Une foule de sensations et une couleur dont il couvre ses tableaux : terre d’ombre brûlée. De sa « géode en feu » il laisse échapper ses souvenirs proches et lointains, ses réminiscences littéraires et picturales. Ce délire émouvant est aussi une réflexion aiguë et réfléchie sur la création littéraire et picturale.
Primé par le Conseil Général de Haute-Marne, ce récit a dû attendre 2008 pour être édité, comme le bon vin doit fermenter de longues années en tonneau pour épanouir ses meilleures saveurs. Il l’a été enregistré avec le soutien de l’association des Ecrivains de Haute-Marne qui ne pouvait laisser ignorée une œuvre aussi intense. Elle a permis à l’association de tenter une nouvelle forme d’édition particulièrement réussie.
Le texte a été enregistré en studio professionnel et a donné lieu à quatre cédéroms d’une heure chacun. Anne Duvoy, Présidente de l’association « Au Cœur des Mots » a offert sa voix, profonde et sensuelle, épanouissant la force et le charme du texte. On peut alors l’écouter partout où le rêve et la poésie sont nécessaire à la vie : seul dans un fauteuil ou dans la cohue des embouteillages de la circulation, dans les longueurs solitaires du métro, pour se plonger dans son intimité, pour s’éloigner de la platitude du quotidien.

Livre audio
Quatre cédéroms d’une heure chacun, dans un coffret avec la reproduction d’un dessin original de l’auteur. Enregistrement en studio professionnel avec la voix de Anne Duvoy. Il n’en existe que trente exemplaires de collection, numérotés de 1 à 30.

Yvon Lallemand avec Jean Robinet, cofondateur de l’Association des écrivains de haute-Marne

 Récits rustiques historiques et légendaires de Haute-Marne (1999)
 Haute-Marne, Terre de Légendes (2008, choix de contes déjà édités et quelques nouveaux) :

      Yvon Lallemand est le spécialiste incontournable des récits légendaires de Haute-Marne qu’il a recueillis au fil du temps et récités dans son style original qui parle directement à l’imagination du lecteur. Ce livre reprend quarante et une légendes des livres précédents désormais épuisés. C’est un voyage entre rêve et réalité, dans le terroir et les mœurs, à lire partout avec le même plaisir que l’on soit d’ici ou d’ailleurs.

Mentions techniques :
Editions Dominique Guéniot, 2008, 192 pages, format 24 x 16 cm,

 Contes et légendes du vieux pays haut-marnais (1980)
 Contes des brumes haut-marnaises (1982)
 Le Chapeau venteux (1995) :

Superstitions, sorcellerie et croyances occultes d’antan et d’aujourd’hui (autoédition)

 52 contes et légendes des hameaux de Haute-Marne (1993)
 Qu’c’est rose en blagues..! (1995): calembours

+ Troupeau de Rêves (recueil poétique)
Fracture Ouverte (inédit)
Livre à Minou ou le Puzzle à deux Pièces (inédit)
La Vie d’une Brique dans un Mur (inédit)

Yvon Lallemand a participé au livre collectif :  52 Ecrivains Haut-Marnais de Jehan de Joinville à Jean Robinet

 

Photo : le bureau de l’AEHM en 20005, Yvon Lallemand, Président, au centre.

Photo :  en 2007, au salon du Grand Pardon de Chaumont, les salles n’ont pas désemplies pendant deux jours.

Après la mort d’Yvon Lallemand, la toute nouvelle AHME a voulu rendre hommage à Yvon Lallemand. Elle l’a nommé Président d’Honneur et a fait un CD à partir d’un de ses livres inédits, Terre d’Ombre brulée (tirage limité à trente exemplaires)